Marcher des kilomètres pour donner un sens à la vie
Le célèbre producteur de jeux Hideo Kojima revient avec une suite attendue: Death Stranding 2: On The Beach. Développer par Kojima Productions et publié par Sony Interactive Entertainment, le jeu sera, pour l’instant, exclusif à la PlayStation 5. Prévu pour une sortie le 26 juin 2025, le jeu d’action/aventure nous emmène en Australie, 11 mois après les événements du premier volet, avec une mission familière: reconnecter un monde toujours aussi fracturé.
Une suite logique
Avant d’entrer dans le vif du sujet, une mise en context s’impose. Death Stranding 2: On The Beach s’inscrit dans la lignée directe du premier opus, à la manière de suites comme God of War: Ragnarök ou Horizon Forbidden West: très simimlaire à son prédécesseur, mais plus abouti et raffiné à plusieurs niveaux. Il s’agit vraiment de la suite d’une histoire, mais avec un gameplay et des mécaniques améliorés et retravaillés. J’avais adoré le premier jeu, et si c’est aussi votre cas, vous serez en terrain connu. Ce context est d’autant plus important qu’il serait difficile de parler de Death Stranding 2 sans le comparer régulièrement à son aîné, on verra donc quelques points de comparaison tout au long de cette critique.
Immersion totale
La première chose qui nous frappe lorsqu’on débute l’aventure, c’est l’immense beauté des rocheuses qui s’étalent devant nous. On se rappelle alors que le studio Kojima Productions s’appuie une fois de plus sur le moteur graphique Decima. Ce moteur, gracieusement offert par Herman Hulst, co-fondateur de Guerilla Games (Horizon) et alors à la tête du studio, symbolisait le début d’un partenariat entre Kojima et PlayStation. Hulst, maintenant CEO de Sony Interactive Entertainment, venait de frapper un bon coup pour PlayStation avec l’exclusivité de Death Stranding. Pensé à l’origine pour les mondes ouverts et les panoramas naturels post-apocalyptiques, Decima s’est révélé parfait pour l’univers de Death Stranding. Après quelques modifications techniques à l’engin, Kojima a su exploiter sa puissance pour faire briller le premier opus, et il repousse encore les limites du moteur dans cette suite visuellement éblouissante.

Sur la PlayStation 5 Pro, Death Stranding 2 s’impose comme l’un des jeux les plus impressionnants techniquement de sa génération. Fidèle aux standards actuels, le titre propose deux modes graphiques: un mode Fidélité en 4K et un mode Performance à 60 images par seconde. À l’heure actuelle, aucun mode “Pro” distinct n’est affiché dans les menus, bien que le jeu ait été annoncé comme optimisé pour la PS5 Pro. Il est donc possible qu’un mode spécifique soit intégré au lancement, ou qu’il soit déjà actif de manière transparente. Pour ma part, le mode Performance est clairement le choix à privilégier: la fluidité de l’expérience transforme la traversée des paysages en un pur plaisir. Le mode 4K affiche une légère amélioration en netteté, mais le gain ne justifie pas, selon moi, la perte de réactivité. Bien entendu, cela reste une question de préférence, ce sera donc au joueur de se forger sa propre opinion.
Mais revenons à nos montagnes, car oui, le terrain est très montagneux et aride, et c’est justement ce qui fait briller le jeu. Chaque roche, chaque fissure, chaque paroi est modélisé avec une précision impressionnante. La lumière joue un rôle essentiel dans ce rendu: les ombres sont finement dessinées, qu’il s’agisse d’un massif imposant ou d’un simple caillou. Les vêtements et l’équipement des personnages ne sont pas en reste, avec un niveau de détail et de réalisme remarquable. Visuellement, le jeu adopte un style très terre à terre, presque photoréaliste. On pourrait craindre que ce réalisme atténue la personnalité du jeu ou rende la direction artistique monotone, mais c’est tout le contraire. La beauté brute de la nature est utilisée avec intelligence pour offrir des moments visuellement époustouflants, qu’il s’agisse d’un coucher de soleil flamboyant, d’un désert silencieux ou d’une nuit étoilée saisissante. On note d’ailleurs l’ajout d’un cycle jour/nuit et de variations météorologiques, une nouveauté par rapport au premier opus. Ces changements restent subtils, mais renforcent grandement l’immersion. La variété des biomes apporte aussi de la richesse à l’aventure et ajoute une dimension subtile au gameplay.

Un autre élément qui renforce l’immersion est le travail sonore. L’ambiance générale reste assez légère et épurée, portée par les sons de nos pas, du moteur de notre véhicule, ou encore d’une pluie soudaine qui nous pousse parfois à faire une pause bien méritée. Fidèle à la formule du premier opus, certains moments clés du voyage sont amplifiés par l’ajout d’un morceau musical parfaitement choisi qui cadre parfaitement avec la situation et donne le ton pour la suite. Ce genre d’instant nous plonge profondément dans l’univers du jeu, en plus de nourrir notre envie de poursuivre l’aventure.
Rigidité
Tout comme les graphismes, le gameplay de Death Strading 2 s’inscrit dans la continuité logique du premier opus. La prise en main reste familière, bien que légèrement améliorée. On y découvre quelques nouveautés bienvenues, comme un menu rapide pour gérer sa cargaison plus efficacement, de nouveaux objets à utiliser sur le terrain, ainsi qu’une personnalisation plus poussée du personnage. J’ai d’ailleurs bien aimé l’ajout d’un arbre de compétences flexible qu’on peut adapter selon la mission en cours ou notre style de jeu.
La prise en main reste néanmoins un peu rigide, à l’instar du premier volet de la série. Les véhicules, en particulier, manquent de souplesse et réagissent parfois de façon imprévisible. On aurait peut-être préférer des contrôles plus détendus, à la manière d’un Grand Theft Auto par exemple. Les combats, eux aussi, peuvent souffrir d’un certain manque de fluidité. Il existe une dimension stratégique dans le choix des armes et des équipements, mais on finit souvent par se rabattre sur ses préférés, ce qui rend les affrontements un peu répétitifs. Les boss, quant à eux, sont très impressionnants et offrent des séquences intenses et plaisantes, mais leur conception reste assez uniforme. On aurait aimé voir plus de variété dans leurs mécaniques, car les combats finissent par se ressembler. Malgré tout, le gameplay reste à la base très solide et agréable.

Le jeu peut aussi sembler répétitif dans sa boucle de gameplay, mais ce n’est pas nécessairement un défaut. Cette structure devient rapidement évidente dès les premières heures: on se prépare dans une base, on traverse un paysage semé d’embûches, on atteint une autre base, puis on échange avec un personnage pour obtenir la suite de la mission. Heureusement, chaque étape de cette boucle est plaisante à sa manière. La phase de préparation est stratégique : il faut sélectionner avec soin ses armes et équipements en fonction des défis attendus. Le menu, bien segmenté, guide efficacement le joueur à travers les différentes étapes. Même si cette phase peut paraître un peu longue, on est souvent récompensé pour avoir bien anticipé les besoins de la mission. Les trajets entre les bases, eux, sont particulièrement agréables, portés par l’aspect visuel impressionnant du jeu. Quelques obstacles viendront ponctuer le voyage, mais ils sont généralement faciles à éviter ou compléter. J’aurais toutefois aimé que certaines missions imposent l’utilisation de moyens de transport spécifiques, afin d’ajouter un peu de variété aux déplacements.
Les contrôles sont parfois un peu contre-intuitifs et manquent de naturel. Il existe un bouton pour pratiquement chaque action, et certains ne m’ont même jamais servi, ce qui offre une belle flexibilité, mais alourdit un peu la prise en main. La DualSense est exploitée à son plein potentiel, c’est le moins que l’on puisse dire. D’ailleurs, le retour haptique est tout simplement exceptionnel: on ressent les fines gouttes de pluie, les secousses des roues sur un terrain accidenté ou encore la puissance d’une explosion en pleine cinématique. À noter également l’ajout d’un corpus, une base de données regroupant des informations sur l’histoire, les personnages et les termes propres à l’univers. C’est grandement apprécié vu la richesse de cet univers.
Univers fascinant, personnages maladroits
Il serait difficile de parler d’un jeu signé Hideo Kojima sans aborder son scénario et son univers. L’histoire reprend onze mois après les événements du premier titre. On incarne à nouveau Sam Porter Bridges (Norman Reedus), un coursier indépendant spécialisé dans la livraison de colis dans un monde post-apocalyptique. Cette fois, il devra traverser l’Australie pour reconnecter diverses bases au réseau sans-fil chiral, dans l’espoir de sauver l’humanité de l’extinction. Comptez environ 35 heures pour terminer l’histoire en accomplissant quelques missions secondaires, mais ce temps sera grandement augmenté si vous voulez compléter toutes les quêtes annexes ou aidez les autres joueurs en ligne. La trame principale reste assez détachée de ce que l’on fait concrètement dans le jeu. On aide les différentes bases avec leur cargaison, mais ces actions ont peu de liens directs avec l’intrigue principale.
L’histoire en elle-même est intéressante et pleine de surprises, mais elle souffre d’une structure un peu trop formatée. Un peu comme la boucle de gameplay mentionnée précédemment, le récit avance à un rythme très régulier, presque trop. Là où le premier opus se démarquait par son imprévisibilité, enchaînant parfois plusieurs missions avant de nous offrir une cinématique de plus de trente minutes, Death Stranding 2 opte pour une progression plus cadrée, ce qui accentue la sensation de répétitivité.

Comme dans le premier jeu, on retrouve ces bases un peu vides, où les interactions se limitent à discuter avec des hologrammes sans grande personnalité. J’aurais aimé pouvoir explorer ces lieux et croiser d’autres personnages. Pour un jeu qui mise sur la reconnection entre les êtres humains, on en voit finalement assez peu, mis à part notre propre équipe. Cela dit, la présence occasionnelle d’autres coursiers à l’extérieur des bases apporte une touche d’humanité bienvenue que j’ai particulièrement appréciée.
Côté personnages, on retrouve plusieurs visages familiers comme Fragile (Léa Seydoux) et Higgs (Troy Baker), mais aussi des nouveaux personnages interprétés par Elle Fanning, Shioli Kutsuna, Luca Marinelli, Alastair Duncan, Alissa Jung et Debra Wilson. On note d’ailleurs d’excellentes performances de Léa Seydoux, Troy Baker et Luca Marinelli, tous trois particulièrement convaincants dans leurs rôles. Le protagoniste, Sam, incarné une fois de plus par Norman Reedus, est aussi très bon, mais j’aurais aimé entendre sa voix un peu plus souvent. Certes, Sam est réservé par nature, mais un usage plus expressif de la voix de Reedus aurait pu ajouter davantage de nuance et d’émotion à certaines scènes clés.

Certains nouveaux personnages tombent malheureusement un peu à plat. Par exemple, Tarman (Marty Rhone) manque totalement d’intérêt. Dollman (Jonathan Roumie), qui nous accompagne tout au long de l’aventure, dégage une certaine froideur, et je n’ai pas particulièrement apprécié la prestation de l’acteur. C’est d’ailleurs selon moi une belle opportunité manquée de la part de Kojima: on aurait pu développer un système de companion narratif entre Sam et Dollman. Imaginez des dialogues et des interactions pendant les longues traversées, un peu à la Kratos et Mimir dans God of War ou bien Joel et Ellie dans The Last of Us. Ces systèmes de dialogue d’exploration enrichissent grandement l’immersion et offrent une excellente manière d’explorer et de mieux comprendre l’univers de ces jeux.
On ne manque toutefois pas d’occasions d’entendre répéter les différents termes de l’univers, les personnages nous rappelant sans cesse la signification de tel ou tel mot. Par exemple, Higgs qui nous répète à chaque rencontre qu’il ne peut pas nous tuer parce que nous sommes un “rapatrier”. On s’en rappelle, merci. Chaque élément du monde semble sur-expliqué, ce qui rend parfois les dialogues un peu forcés. Le joueur peut consulter le corpus au besoin, alors pourquoi les personnages insistent-ils autant ?

Par ailleurs, pour un jeu qui se veut sérieux et terre à terre, beaucoup de scènes sont quelque peu gâchées par des interactions loufoques, comme ce besoin incessant des personnages de nous donner des “likes” en levant le pouce, et ce, même lorsqu’ils sont supposément inconscients! De plus, certains noms de personnages sonnent très clichés, ce qui casse un peu l’immersion. Le jeu est parsemé de moments malaisants qui n’apportent finalement pas grand-chose à l’expérience globale.
Conclusion
Malgré ses quelques défauts, Death Stranding 2: On The Beach demeure un jeu à grand déploiement particulièrement impressionnant. Le gameplay, bien qu’un peu rigide, est tout de même prenant et soutenu par plusieurs systèmes bien pensés et bien intégrés. Kojima Productions a su faire briller le moteur Decima avec un rendu visuel qui place la barre très haut pour les prochains jeux sur PlayStation 5. La musique, toujours bien choisie, accompagne les moments clés avec justesse et laissera assurément une trace. On notera un léger décalage au niveau des personnages, mais rien qui vienne réellement nuire à l’expérience globale. Si vous avez aimé le premier opus, ce deuxième volet ne devrait pas vous décevoir.
Nom du jeu | Death Stranding 2: On The Beach |
Date de sortie | 26 juin 2025 |
Développeur | Kojima Productions |
Série | Death Stranding |
Éditeur | Sony Interactive Entertainment |
Plates-formes | PlayStation 5 |
Genre | Action, Aventure |
Mode de jeu | Solo |
Langue | Multilingue (français inclus) |