TEST – Layers of Fear brosse un portrait sombre d’un passé turbulent

Michael Bertiaux
Michael Bertiaux
lecture de 8 minutes

Bloober Team a bien cheminé depuis 2010. Après avoir bossé sur un jeu musical basé sur l’histoire de Chopin et un MOBA intitulé Deathmatch Village à ses débuts, le studio polonais s’est attelé au genre horreur avec Layers of Fear en 2016. Un jeu qui lui a valu quelques éloges notamment pour son approche unique en matière de conception de niveaux.

Plusieurs éléments se retrouvent d’ailleurs dans le projet qui a suivi, Observer. De ces apprentissages sont nés Layers of Fear 2, Blair Witch et The Medium, pour nous mener aujourd’hui à la sortie du remake de Layers of Fear. Cette fois, Anshar Studios est venu prêter main forte pour conclure le scénario de cette série unique avec des technologies modernes.

Fais-moi peur

L’histoire de Layers of Fear prend place dans les années 1950. Vous incarnez une autrice afro-américaine en retraite loin du monde dans un vieux phare, à la recherche d’inspiration pour produire son nouveau roman. Bientôt, elle sera confrontée à des événements étranges : bruits de pas inhabituels, voix chuchotante, lumière tremblotante ou qui s’éteint d’un coup… quelqu’un (ou quelque chose) semble investir ces lieux… ou est-ce seulement le fruit de son imagination, à des lieux de la civilisation?

Layers of Fear étant un remake, il ne réinvente pas la recette de la série : vous explorez les différents niveaux à la première personne. Le jeu est découpé en plusieurs chapitres, que vous accomplirez dans un ordre précis en sautant de la romancière au peintre ou à l’acteur. Contrairement à un Resident Evil, il n’y a pas de combat proprement dit. En ce sens, le jeu est plutôt inspiré de séries comme Amnesia avec des protagonistes à peu près incapables de se défendre.

L’exploration se déroule dans des environnements souvent photoréalistes, c’est-à-dire très léchés au niveau des graphismes. Et pourtant, Bloober Team fait aussi beaucoup dans le surréalisme et le symbolique avec une conception de niveaux qui ne vous laissera point indifférent. Il arrive que les niveaux se tordent littéralement, vous rebrousserez chemin pour découvrir de nouvelles voies, des peintures prennent vie, il y a des surprises tout au long de l’expérience.

Malheureusement, Layers of Fear est aussi d’une linéarité sévère. Il y a peu de place à l’exploration, ce qui veut dire que le plus clair du temps est passé à traverser des corridors en ligne droite. Les rares segments qui proposent des embranchements sont très courts. Il arrive que les seules manipulations à effectuer sont de pousser le joystick vers l’avant et appuyer sur la gâchette (ou cliquer) pour ouvrir des portes.

Démuni et lent comme un escargot, vous obtiendrez un seul objet en cours de route : une lampe à l’huile ou une lampe torche pour vous défendre d’esprits vengeurs dans les deux scénarios principaux. Cette pauvreté de mécaniques m’a un peu dérangé, mais après le récent Amnesia: The Bunker, je n’étais pas trop dépaysé. N’empêche, Layers of Fear manque cruellement d’interactions outre récupérer des documents ou des objets pour sa collection personnelle. J’ai été surpris par la « grande » nouveauté avec le scénario de l’acteur : être en mesure de se pencher! C’est dire que le répertoire d’actions n’est pas garni. Les miettes que nous avons sont laborieuses, je pense ici à courir.

L’horreur psychologique comme canevas

Layers of Fear est un jeu minimaliste, ce qui se reflète par une interface (UI) épurée à souhait, peut-être trop. Aucune carte ici, ni inventaire ne serait-ce qu’un petit rappel en bas d’écran à droite pour des objets-clés en votre possession. Non, Bloober Team a plutôt misé sur une direction artistique impressionnante, pleine d’idées originales et de délires maléfiques.

Ce remake rehausse l’expérience originale grâce au moteur Unreal Engine 5. Les graphismes saisissants ajoutent à une tension palpable, le tout accentué par une bande-son convaincante. Si d’un côté je déplore le petit éventail d’actions à notre disponibilité, j’ai été ravi de découvrir des idées originales dans le genre horreur sans trop tomber dans les clichés. L’excellente narration y est pour quelque chose. Une tonne de documents vous feront découvrir un scénario tragique et intriguant. Les cinématiques sont peu présentes, Bloober Team préférant raconter par sa conception de niveaux et des voix off.

Je crois aussi que le studio a un peu trop penché du côté fantastique pour certaines scènes, ce qui a miné le côté horreur. En fait, Layers of Fear est un drôle de numéro. Le scénario avec le peintre est angoissant et m’a fait frémir quelques fois. Plus tard, avec l’acteur par exemple, ce sentiment s’est vite estompé, surtout parce que je décrochais avec une tangente marquée vers le bizarroïde au lieu de se concentrer sur des « fantômes ». En fin de partie, j’ai même poussé des « vraiment? » à tel point Layers of Fear s’écarte de ses premières heures pour nouer avec le farfelu.

Pour cette même raison, il devient difficile de tisser des liens entre les différents scénarios et de s’y retrouver, narrativement parlant. Bloober Team a créé un scénario alambiqué, et je pense que l’expérience aurait pu filtrer davantage de contenu pour créer un tout plus uniforme. Le fait d’opter pour l’horreur psychologique n’excuse pas tout. Ajoutez l’absence d’un inventaire et il devient difficile de se repérer par rapport aux différents événements, outre une zone attitrée disponible rarement où toutes vos babioles sont exposées comme dans un musée.

Portrait global

Je n’avais pas joué à Layers of Fear premier du nom, mais je savais dans quoi je m’aventurais. Bloober Team a donné un coup de pinceau avec ce remake dont l’esthétique est saisissante. Le côté sonore, un aspect primordial du genre horreur, a été réalisé avec brio. J’ai eu des frissons au cours de certaines scènes grâce à une combinaison de visuels réalistes et de musique angoissante. L’équipe de développement a bien dosé la musique avec le reste des effets sonores pour créer une expérience qui est parvenue à me glacer le sang plus d’une fois.

En termes de durée de vie, Layers of Fear prend un peu moins de 10 heures à compléter. C’est beaucoup plus que le titre original, ce qui s’explique par l’inclusion du nouveau chapitre suivant l’écrivaine. Ainsi, Bloober Team unifie le scénario des deux premiers jeux. Les personnes désireuses de tout compléter seront peut-être intéressées par l’existence de conclusions alternatives.

Nom du jeuLayers of Fear
Date de sortie15 juin 2023
DéveloppeurBloober Team en collaboration avec Anshar Studio
SérieLayer of Fear
ÉditeurBloober Team
PlateformesMac, PC (GOG, Epic Games Store et Steam), PlayStation 5 et Xbox Series X|S
GenreHorreur
Mode de jeuSolo
LangueMultilingue (français disponible pour l’interface et les sous-titres)

Layers of Fear

7.4

Graphismes

8.0/10

Trame Sonore

8.5/10

Jouabilité

6.5/10

Scénario

7.0/10

Durée de vie

7.0/10

Pour

  • Direction artistique
  • Une interface de jeu minimaliste
  • Conception de niveaux parfois flippante
  • Narration

Contre

  • Très linéaire
  • Vitesse de déplacement lente
  • Pauvreté des actions
  • Trop farfelu par moments
  • Mode HDR trop sombre
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Rédacteur passionné par l'industrie du jeu vidéo depuis plus de 20 ans, je me donne comme mission de partager l'actualité de cet univers fascinant.
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